1765-06-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence.

Heureusement, Monsieur, le gouverneur de Pierre-En-cise, est un officier rempli d'honneur, et qui a les mœurs les plus aimables.
Il n'est occupé que d'adoucir le sort de ceux qu'il est obligé de recevoir dans le château, et la personne dont vous me parlez ne pouvait être en de meilleures mains.

Vous aurez pu recevoir déjà un petit paquet que Mr Le marquis De Charas doit vous remettre; c'est un jeune homme qui m'a paru bien digne de l'amitié que vous avez pour lui. Je suis un peu tombé en décadence depuis que je n'ai eu l'honneur de vous voir; les longues maladies ont précipité chez moi la décrépitude. Je ne crois pas que j'aie longtemps à vivre, mais vous pouvez compter que les sentiments que vous m'avez connus s'affermiront dans moi jusqu'au dernier moment, et que je vous aimerai toujours avec la même tendresse. Il me sied plus de vous parler de pâté de perdrix, mais quand vous voudrez donner quelques ordres adressez les à Mr Wagniere cher Mr Souchay à Genêve.

Made Denis vous regrête toujours, vous et Monsieur vôtre frère, et vous ne doutez pas que je n'enchérisse sur ses regrêts. Mille tendres respects.

V.