28 janvier 1765
Mon cher ange, d'abord comment va la toux de made d'Argental, et pourquoi tousse-t-elle?
Ensuite je remercie très humblement m. le duc de Praslin du passeport. Ensuite vous saurez que je bataille toujours avec le tyran du tripot, mais vous sentez bien que je serai battu. Il y a de l'aigreur, on ne m'en a jamais dit la raison. J'avais imaginé que cet étrange fou de Vergy qui avait été à Bordeaux, et qui est de Bordeaux, avait fait quelques tracasseries; mais comme je ne vois tout cela qu'avec une lunette de longue vue qui ne vaut rien, je ne peux guère faire que des conjectures ridicules.
Il me semble au sujet des roués qu'il ne serait pas mal d'attendre Pâques. Peut-être l'acteur dont vous me parlez, aura déployé alors des talents qui encourageront le petit ex jésuite.
Voulez vous que je vous envoie un portatif sous le couvert de m. le duc de Praslin? Je ne m'aviserai pas de prendre de ces libertés sans vos ordres précis. Les auteurs de cet ouvrage n'ont pas été assez loin; ils n'ont fait qu'effleurer les premiers temps du christianisme; vous savez bien que Paul était une tête chaude; mais savez vous qu'il était amoureux de la fille de Gamaliel? Ce Gamaliel était fort sage, il ne voulut point d'un fou pour son gendre. Il avait à la vérité de larges épaules, mais il était chauve et avait les jambes torses; son grand vilain nez ne plaisait point du tout à mlle Gamaliel. Il se tourna du côté de ste Thécle dont il fut directeur. Mais en voilà trop sur cet animal.
Mon cher ange, vivez gaiement, et aimez le plus que borgne.
Permettez que je mette ici un petit billet pour l'ami le Kain.