Monsieur,
Je vous demande mille pardons d'avoir tardé si longtemps à vous marquer la réception de vos observations que j'ai pris la liberté de lire pensant bien que vous ne vouliez pas m'en faire un mystère.
Je les ai envoyées à m. de Voltaire sous contreseing, et l'ai prié de me faire passer sa réponse, s'il le jugeait à propos sous couvert de m. de Caumartin. Si ce demi dieu daigne s'abaisser jusqu'à parler à de simples mortels, j'aurai l'honneur de vous envoyer ses oracles, qui me paraissent pourtant sujet à révision, ce qu'il me semble que vous avez très bien fait dans vos remarques. Je vous avouerai néanmoins monsieur que le préambule de vos observations annonce autre chose que ce que vous exécutez. J'ai compris que vous vouliez prouver contre m. de Voltaire l'authenticité du testament politique, comme étant véritablement l'ouvrage du cardinal de Richelieu. Au lieu d'établir cette vérité comme je m'y attendais, vous relevez des bévues de m. Devoltaire. Le lecteur y trouve son compte, mais le projet annoncé ne se trouve pas rempli.
Au reste, monsieur, si vos occupations vous permettaient, ainsi qu'à d'autres bons esprits, tels que notre digne ami Lamoot, par exemple, de faire un examen raisonné de tout ce qu'avance au hasard m. De Voltaire, tant de gens qui l'admirent seraient étonnés de lui avoir prodigué leurs hommages. Pour moi, monsieur, je rends les miens à des citoyens vertueux et utiles à la société, tels que vous. Je vous rends mille grâces des marques d'amitié dont vous m'honorez, vous suppliant de vouloir bien présenter mon respect à madame et à mlles Gamonet, et d'agréer les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être
Monsieur
votre etc.
Villette
Paris ce 11 janv. 1765