1763-04-02, de Louis René de Caradeuc de La Chalotais à Voltaire [François Marie Arouet].

Voïla Monsieur le mémoire que j'ai eu l'honeur de vous annoncer, j'avois fait il y a fort longtemp quelques observations sur ce sujet, je les ai égarées parmi un tas de papiers.
J'ai dicté cecy fort à la haste come vous verrés, et l'envie de vous plaire, fait que je me hâte de vous l'envoyer. Je ne sçay comment il se fait monsieur que je crains moins de vous envoyer un ouvrage brut et informe qu'à tout autre. Si vous daignés faire le moindre usage de celuy ci vous sentirés en le lisant que j'ai le plus grand intérêt à n'être cité pour rien à cause de quelques principes qui y sont contenus. Au reste ce ne sont que des observations indigestes qui gagneroient bien à passer par vos mains. Je les crois au fonds très véritables.

M. d'Argental mon ancien ami m'a renvoyé le plan que vous avés eu la bonté de luy faire tenir, et il m'a fait l'amitié de dire qu'il en étoit très content. Mais après votre approbation je dis

Paroissés Navarrois&c.

Les Etats de Bretagne vous deveroient des Remercimens monsieur de ce que vous voulés bien dire d'obligeant des Têtes Bretones, certenement L'affaire des Calas ne seroit pas arrivée au P͞t de Bretagne. Qui est ce qui n'a pas entendu parler de cette affaire et de la façon noble et généreuse avec laquelle vous avés pris le parti des opprimés? J'ai tout lu et j'en ai frémi. Qu'on dise après cela qu'il ne faut plus parler contre le fanatisme, je voudrois qu'on envoyast ce procès en Revision à quelque parlement, ce seroit luy faire honeur.

Dii tibi si qua pios respectant numina, si quid
usquam justitiæ est et mens sibi conscia recti
præmia digna ferant, quæ te tam læta tulerunt
sæcula, qui tanti talem genuere parentes?
in freta dum fluvii current, dum montibus umbræ
lustrabunt, convexa polus dum sidera poscet
semper honos, nomen que tuum, laudes ͞manebunt.

Je ne voulois monsieur vous faire qu'une citation, je n'ai pu m'empêcher de copier tous ces vers et je n'en ai pu retoucher aucun, je ne pouvois y rien ajouter et je finis en vous suppliant d'agréer mes homages, mes respects et ma vénération profonde.