1764-09-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à César Gabriel de Choiseul, duc de Praslin.

Monseigneur,

Malgré mon extrême crainte de parler des petites affaires à ceux qui en gouvernent de grandes, je ne peux me priver plus longtemps du plaisir de vous présenter les très humbles remerciments de madame Denis et les miens.
Nous sommes pénétrez de vos bontez autant que nous comptons sur votre protection.

J'ose vous supplier de daigner parcourir les pièces cy jointes. Les petits états de notre petite province se joignent à nous comme vous verrez par leur requête.

Nous avons pour nous Henri quatre et Monsieur le duc de Pralin. Il est difficile qu'on ne se rende pas à ces deux noms.

Il est étrange que dans cette affaire qui a flotté cent trente ans entre des arrêts contraires les uns aux autres, on n'ait pas encor produit les lettres patentes de Henri quatre enregistrées au parlement de Bourgogne qui devaient tout terminer. Il faut ou qu'on les eût ignorées ou que le parlement ait fait plus de cas du concile de Latran qui nous ôte nos dixmes, que de Henri le grand qui nous les donne.

Nous espérons que les ordres de ce grand roy soutenus de ceux de sa magesté acquéreront une nouvelle force en passant par vos mains. Nous plaidons pour deux républiques, pour les états de notre province, pour le maintien de quatre traittez solemnels, et nous n'avons contre nous qu'un concile du douzième siècle.

Agréez la reconnaissance et le respect avec les quels je serai toutte ma vie

Monseigneur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire