[c. 10 June 1763]
Je reçus avant hier monsieur par madame la duchesse les lettres secrettes de la reine Christine dont vous avez bien voulu m'honorer.
Je ne suis pas étonné de voir combien l'assassinat de Monaldeschi vous révolte. Vous faittes bien de l'honneur aux autres états de dire qu'on aurait puni Christine partout ailleurs qu'en France. Elle l'eût été sans doute dans les pays où les loix règnent, mais ces pays sont en petit nombre, et Christine eût été impunie à Rome, à Madrid, à Vienne. Je vous serais très obligé monsieur de vouloir bien me donner quelques éclaircissements sur l'autenticité de ces lettres. J'ay donné quelques lettres de Henri 4 très curieuses dans la nouvelle édition de l'essai sur l'histoire générale. Je les tiens de M. le chevalier de la Motte qui les a copiez à Andouin sur l'original. J'ignore si les lettres secrettes de Cristine sont écrites en italien et traduittes en français. Je vois avec peine dans ces lettres les termes de pompons et de calotins, mots que j'ay vu naître dans notre langue. Au reste si ces lettres sont de Christine elles font peu d'honneur à son jugement. Quand on a abdiqué un trône il faut être sage, mais supposé qu'elle ait eu le malheur d'écrire avec un orgueuil si imprudent, ce livre est toujours un monument prétieux. Je vous en remercie et je vous supplie d'éclaircir mes doutes.
J'ay l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois,
M.