8e May 1763
C'est beaucoup, mon cher adepte, d'avoir ôté comme vous avez fait, toutes les mauvaises herbes qu'on avait voulu faire croitre dans vôtre jardin, on y sême ensuitte ce qui parait le plus convenable.
C'est un grand point d'avoir sécoué le joug de l'erreur, et de sçavoir bien positivement ce qui n'est pas; on peut tranquilement ignorer alors ce qui est, et s'en tenir au plus vraissemblable, jouïr doucement de la vie, et attendre la mort sans crainte.
Je suis très affligé de l'interruption de vôtre voiage, et des raisons qui vous ont retenu. Je me serais fait un plaisir bien sensible de vous embrasser, et de raisonner avec vous de philosophie; si vous voulez y joindre un peu de phisique, je vous suplierai d'y joindre vôtre remêde pour les boeufs malades. Si vous avez aussi quelque secrêt pour la viéillesse et pour la faiblesse, je vous prie d'en gratifier un vieillard qui vous aime de tout son coeur.