1762-08-25, de Voltaire [François Marie Arouet] à Anne Rose Calas.

On se trompe beaucoup quand on dit que madme de P. ne s'intéresse pas à l'affaire; il est vrai qu'elle ne peut, ni ne doit, agir ouvertement, mais il est certain qu'elle est très touchée d'une si horrible injustice, qu'elle rendra tous les services possibles sans se compromettre; voilà sur quoi made C. peut compter.
Il ne faut pas s'étonner si mr de St Florentin a reçu le placet sans le lire, on ne lit guère de placets à l'audience. Il faudrait que l'audience tînt vingtquatre heures pour les lire tous.

Il ne faudrait pas s'étonner qu'on ne rendît à Me C. ses filles, qu'après la revision du procès.

Le gain de ce procès me paraît sûr. Mr le premier président de Nicolaï est celui qui a agi le plus fortement auprès de mr le chancelier. Il serait bon que me C. allât le remercier quand il sera à Paris.

Tout ce qu'on a fait jusqu'à présent a consisté à disposer favorablement les esprits, à émouvoir la compassion publique, et à exciter l'indignation. Tout le reste se fera bien facilement. Made C. peut être tranquille. Elle sera très bien servie par mrs Mariette et de Beaumont, et on prend de tous côtés les meilleures mesures en sa faveur.

Quant au jeune Lavaysse, c'est assez qu'il rende justice à la vérité dans le cours du procès, mais il ne doit pas négliger de faire connaître cette vérité à tous les particuliers auxquels il pourra parler. C'est un devoir dont il ne peut se dispenser, et dont sans doute il s'acquittera. En un mot, que made C. se repose sur son innocence, et sur le zèle inaltérable de ceux qui s'intéressent à son affaire.