Ce 20 mai 1762 des Délices
Il y a bien longtemps Monsieur que je n'ai eu l'honneur de vous écrire.
Nous avons été dans de grandes alarmes. Heureusement mr Tronchin nous en a tiré. Mon Oncle se porte aussi bien que sa situation le permets. Il a seulement un peu de peine à recouvrer le Someil. J'espère que le lait d'ânesse qu'il prand àprésant le lui fera retrouver. Tous les Tronchains dans des genre différans sont d'aimables gens.
Je vous suis bien obbligée d'avoir rembourcé à mme la présidante Dalbertas ses tafetas. Je l'avais chargé de cette Comition pour vous en éviter la peine, craignant toujours d'abbuser de votre temps.
Mon Oncle veut faire une galantrie à une de ses gardes. C'est mme Cramer la geune qui ne l'a point quité dans sa maladie. Nous voudrions 17 ou 18 aunes de tafetas chiné. Nous ne voulons ny fond blanc n'y fond geaune. Je sçais que cette Comission n'est pas facile car on dit qu'il n'y a plus de tafetas chiné dans Lion mais je me flate que vous en trouverez encor. Vous aurez la bonté de mettre cette article sur le comte de mon Oncle. Nous ne voulons n'y fond blanc n'y fond geaune. Du reste prenez touttes les couleurs qui vous plairont et ne parlez point de la Confidence que je vous fais. Je vous prie aussi Monsieur de vouloir bien paier à Gerard, menuisier, 80lt qu'il viendra vous demander pour deux bois de chaises longues qu'il m'a envoié. Je vous en serai bien obbligée. Vous m'enverez je vous prie le tafetas à l'adresse de Mr Catala.
Nous sommes toujours aux Délices, cette maison devient charmente. Je ferai de mon mieux pour y rester jusqu'à ce que la santé de mon Oncle deviene plus affermie.
Adieu Monsieur, ne doutez jamais de ma reconnoissence et des sentiments avec les quels j'ai l'honneur d'être Monsieur Votre très humble et très obbéissente servente
Denis
Un frère de mon Cuisinier a 6 mille sinq cent livres à plasser. Il me charge de vous demender si vous voulez les prendre au denier que vous ordonnerez. Réponce s'il vous plait.