1761-08-11, de Voltaire [François Marie Arouet] à marchese Francesco Albergati Capacelli.

Vous verrez, mon cher Monsieur, L'Etat où je suis, par ma Lettreà Mr Paradisi, que je vous envoie toute ouverte.
Si jamais je retrouve des yeux et de la santé, j'en ferai bien usage pour cultiver vôtre commerce charmant. La belle Lettre que vous me fites l'honneur de m'écrire il y a quelque temps, a été reçüe en France avec un aplaudissement universel; on n'a point été surpris que vous pensiez bien; mais on l'a été que vous écriviez en nôtre Langue avec tant de pureté et d'énergie.

Dans le temps que je pouvais lire, j'ai lû avec un plaisir extrême, les Tragédies de Mr Varano, et quand j'aurai des yeux je les relirai encor. Oserais-je vous supplier de faire mes excuses à Mr Algarotti, auquel je voudrais écrire, et auquel je n'écris point? Nonseulement il faut qu'il me pardonne, mais qu'il me plaingne. Adieu, Monsieur, aveugle ou borgne; sain ou malade, je prends la liberté de vous aimer autant que je vous estime.

V.t.h.ob.sr

Voltaire