Ferney 7e August 1761
J'ai reçu, Monsieur, La Lettre dont vous m'honorez du 2e aoust, et le group de 4200lt 10s.
Nos malheurs s'accumulent tous les jours. Nous ne pouvons faire que la paix la plus humiliante, ou la guerre la plus ruineuse. Mille familles sont ruinées, et tous les particuliers souffrent beaucoup, excepté le petit nombre de ceux qui gagnent aux calamités publiques. C'est assurément le temps de réparer par son œconomie les pertes que la situation présente fait éssuïer; mais malheureusement je suis dans un enchainement de dépenses que je ne peux arrêter; et quand on s'est obstiné à s'établir et à vivre dans le païs de Gex, il faut un peu orner ce malheureux païs.
Je vois bien que vous ne nous renverrez Mr François que le plus tard que vous pourez.
A propos, je ne suis pas extrèmement content de Mr Le Controlleur général. Il est le seul à la cour qui ne s'intéresse pas aux souscriptions que je fais faire pour une Edition de Pierre Corneille, en faveur de sa petite fille. Le Roy prend la valeur de deux cent éxemplaires, tous les princes ont suivi cet éxemple, mr de Richelieu en prend vingt, mr le Duc de Choiseuil vingt, etca. Mr Bertin ne m'a pas seulement répondu. Ma nièce et moi nous vous embrassons de tout nôtre cœur.
V.