1760-09-09, de Voltaire [François Marie Arouet] à Étienne Noël Damilaville.

Je suis, monsieur, plus touché que jamais de l'intérêt que vous voulez bien prendre à ce qui me regarde.
Vous aimez les belles lettres; je les ai cultivées jusqu'à l'âge de soixante-sept ans. Je donne mes pièces aux comédiens et aux libraires sans la moindre rétribution. Je mérite peut-être quelques bontés du public; je n'ai recueilli que des persécutions. Fréron et Pompignan m'ont poursuivi jusque dans ma retraite; ils m'ont forcé à être plaisant sur mes vieux jours, et j'en rougis. Je vous prie, monsieur, d'avoir la bonté de vouloir bien envoyer, par la petite poste, cette lettre à m. Thiriot, qui n'est pas assez riche pour supporter souvent les frais de la poste des frontières à Paris; c'est d'ailleurs un homme qui aime les belles lettres autant que vous. Je vous demande bien pardon.