1760-06-02, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Robert Tronchin.

Si vous êtes party Mon cher correspondant tant mieux, tous ceux qui vous aiment icy dont le nombre est grand en auront plus tôt le plaisir de vous revoir, et vous savez que made Denis et moy nous sommes de cette confrairie.
Si vous n'étes point party, et si vous n'avez pas fait vendre mes guenilles je vous confie que j'ay reçu une lettre d'un homme un peu au fait, qui me dit de ne rien vendre.

Si vous avez vendu il n'y a point de mal. Je ne me repentirai jamais de rien, et je serai très content d'avoir perdu un tiers pour acheter un pré avec les deux tiers restants, car j'aime mieux du foin que des lotteries.

Rien n'est plus beau à présent que votre pays. Comptez que les billets de confession, les convulsions, les remontrances, et Rousseau Jean Jaques marchant à quatre pattes sur le téâtre de Paris, et les édits de Silhouette etc., etc. ne valent pas nos charmants paysages. Soyez sûr qu'il vaut mieux être sur les bords tranquiles du lac Léman que dans le fracas de Paris. Je vous embrasse et embrasserai.

V.