1760-05-12, de Étienne François de Choiseul-Stainville, duc de Choiseul à Voltaire [François Marie Arouet].

Je permettrais si cela était à mon pouvoir, à toute l'Angleterre de venir en France pour vous garantir d'un rhume; jugez avec quel empressement j'expédie le passeport de votre pauvre Irlandais puisque votre médecin le désire et que son attention pour vous y est intéressée.
C'est pour vous seul au moins que je me dépêche d'envoyer le passeport, car je ne fais pas grand cas de votre docteur Tronchin, à toutes les sottises que j'entends dire qu'il a faites et dont il a été cause à Paris.

Il y a une pièce intitulée l'Ecossaise que l'on dit de vous et qui court le monde; on assure qu'elle est intéressante, je trouve moi que vous êtes trop grand pour dire des injures personnelles à Fréron; j'aime un peu ce Fréron, j'ai été au collège avec lui et, quoique je n'approuve pas ces satires, je suis fâché que vous ne les méprisiez pas.

A la façon dont D'Argental parle d'une comédie des Philosophes, je doute que vous l'approuviez. Quoiqu'on en dise, je ne protège ni l'auteur ni la pièce, à moins que ce ne soit protéger que d'avoir lu la pièce qui m'a paru écrite à merveille et, comme je suis bête, je n'y ai reconnu personne. Adieu, mon cher solitaire, je n'ai pas le temps de vous en dire davantage.