aux Délices [c. 10 March 1759]
Les seigneurs curateurs de l'académie de Lausane, etc. me font l'honneur mon cher ami de me mander en corps, qu'ils ont condanné le libelle en question et qu'ils censureront L'éditeur.
Je suis également touché de leurjustice, de leur bonté et de leur extrême politesse. Je ne doutais pas d'un jugement si équitable et d'un procédé si noble après les lettres dont leurs Excellences Mrs les avoyers, et les principaux membres de la souveraineté m'avaient honoré sur cette affaire. En effet il n'était point du tout convenable qu'il fût permis d'insulter dans un libelle diffamatoire une famille vertueuse, et très innocente des fautes de son père. Mr Saurin, ancien secrétaire de Mg. le prince de Conty, méritait des égards. J'étais chargé de sa part, et de celle de toutte sa famille d'empécher ce scandale. Je l'ay fait avec tout le zèle de L'amitié; j'ay rempli mon devoir, et je vois avec plaisir que j'ay été secondé de tous les honnêtes gens.
Je vous prie de montrer cette lettre à mr le ministre Polier de Bottens et à Mr Dhermanche dont l'honneur, la probité et la bonté ont pris si généreusement le parti d'une famille affligée. Je vous supplie surtout mon cher ami, de présenter mes très tendres et respectueux remerciments, à Monsieur le bailli pour qui je conserverai une éternelle reconnaissance. Adieu, je n'ay jamais si bien senti que dans cette petite affaire le prix de votre amitié et tout ce que vaut la franchise de votre belle âme. Je m'applaudis plus que jamais d'avoir été attiré à Lausane par vous. Je vous embrasse du meilleur de mon cœur. Mille respects à votre chère philosophe.
V.