Nous soussignés déclarons que le nommé François Grasset nous ayant vôlé pendant l'espace de dix huit ans, ou à peu près, qu'il nous a servi en qualité de Commis, Le magnifique Conseil nous fit demander en l'année 1756 une déclaration de ce qui s'était passé; que nous nous conformâmes à cet ordre, et la donnâmes à Monsieur l'auditeur de Normandie; en l'accompagnant des pièces qui pouvaient Constater ses friponneries.
Ensuitte de quoi le magnifique conseil le décréta de prise de Corps.
Genêve le 11e février 1759
Les frères Cramer
Voicy Monsieur un petit certificat qui peut servir à faire connaitre ce Grasset pour le quel on demande votre protection. Ce malheureux a imprimé à Lausane un libelle abominable, contre les mœurs, contre la relligion, contre la paix des particuliers, contre le bon ordre. Il est digne d'un homme de votre probité et de vos grands talents de refuser à un scélérat une protection qui honorerait des gens de bien. J'ose compter sur vos bons offices ainsi que sur votre équité. Pardonez à ce chifon de papier. Il n'est pas conforme aux usages allemands mais il l'est à la franchise d'un français qui vous estime et qui vous révère plus qu'aucun allemand. Un nommé Verleche ou Lerveche, cy devant précepteur de mr Constant, est l'auteur d'un libelle sur feu Saurin. Il est ministre dans un village je ne sçais où près de Lausanne. Il m'a écrit deux out trois lettres anonimes sous votre nom. Tous ces gens là sont des misérables qui sont bien indignes qu'un homme de votre mérite soit seulement sollicité en leur faveur. Je saisis cette occasion de vous assurer de l'estime et du respect avec les quels je serai toutte ma vie
Monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire gentilho͞e orde de la chambre, du Roy, comte de Tournai
à Tournay au pays de Gex par Geneve, 13 février [1759]