1758-02-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Robert Tronchin.

Mes petites affaires avec L'Electeur Palatin, mon cher correspondant, vont mieux que celles que je peux avoir avec le Roi de Prusse.
Je vous prie d'envoyer à Paris ce petit billet de change pour en coucher la recette dans votre greffe. Je ne crois pas que des lettres de change sur la Silésie fussent si bien acquitées que le sera celle cy.

Vous me ferez plaisir de vouloir bien m'instruire de la manière dont la lettre sur un ministre public aura été reçue: car ce n'est pas chose ordinaire d'endosser des lettres de change sur ces messieurs.

Je crois que la personne que vous savez aura été un peu piquée qu'on luy ait mandé, Je vous ferai réponse par un de mes commis. Cette manière de répondre n'est ny agréable ny de bon augure.

Il y a tant de raisons particulières qui doivent influer sur ce gros commis, qu'il persistera dans les idées avec les quelles il a commencé son commerce, et il y a grande apparence qu'il fera la même fortune qu'a faitte le grand banquier que vous voiez souvent. C'est cet objet de commerce dans le quel la cochenille et la bonneterie ont part, qui doit l'occuper préférablement à tout.

On dit qu'il est arrivé à Cadix un vaissau tout plein d'or et d'argent. N'y avez vous point quelque part? Pour moy quand tout le Mexique et tout le Perou arriveraient, je n'aurais pas de nouvelles de Mrs Gilly. Je pense qu'ils sont morts, ou qu'ils me croient mort.

Bonsoir. Je suis en vie pour vous aimer.

V.