1758-01-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à François de Chennevières.

Je ne me porte pas assez bien mon cher monsieur pour vous répondre en vers, mais mon état languissant ne m'empêche pas de sentir le mérite des vôtres.

Mêlez je vous prie à vos vers, un peu de prose qui m'instruise des détails de la victoire qu'on dit remportée le 26 xbre par monsieur le maréchal de Richelieu. Je n'ai encore que des bruits vagues. Il est bien étrange que cette nouvelle ne soit pas encore confirmée dans un pays qui a trois régiments à votre service dans cette armée. On dit made la duchesse d'Orléans malade sans espoir de guérison. Cette triste nouvelle est elle vraie? La mort est partout, dans les palais, dans les chaumières, dans les champs de carnage qu'on appelle les champs d'honneur, et les douleurs du corps et les peines de l'esprit sont pour la vie.

Ecrivez moi, vous me rendrez la vie douce.