1757-02-06, de Marie Louise Denis à Henri Louis Lekain.

Votre lettre Monsieur m'a fait un plaisir extrême.
L'éloignement ne me fait point oublier n'y vos grands talens n'y mon anciene amitié pour vous. On nous mende de toute part que vous vous surpassez encor dans Semiramis. On dit aussi que Mlle Dumeny y fait des merveilles.

Mon Oncle écrira certenement à Mr le Maréchal de Richelieu pour le Congé que vous demendez. Il n'a pu le faire jusqu'à présant n'aiant pas cru Convenable de lui parler de Comédie dans un momant où le roy a donné de si justes alarmes à toute la France. Il me charge de vous dire qu'il lui écrira incessament. Si vous passez par Lion vous seriez bien aimable de venir nous voir quel que jours aux Délices. Vous les trouveriez bien mieux nommés actuelement qu'ils n'étoient autrefois, et vous y trouveriez deux personnes qui vous aiment toujours. Nous nous arrengerions pour que votre voiage ne vous coûta rien et nous pourions jouer ensemble devant mon Oncle Alzire, Zaire, Merope affin de lui donner envie de vous donner encor une pièce. Pencez à cela. Nous saurions nos rôles à votre arrivée, vous m'écririez le jour de votre arrivée et nous surprenderions tout le monde. Pencez y sérieusement, mais gardez moi un secret inviolable. Je vous le demende en grasse. Adieu Monsieur, soiez bien sûre que personne ne vous admire avec plus de plaisir que moi et que je conserve pour vous la plus inviolable amitié.

Denis