1755-10-27, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Robert Tronchin.

Je reçois mon cher correspondant votre lettre du 26.
Que ferai-je pour vous marquer ma reconnaissance? Je ne peux que vous planter des allées d'arbres, et vous préparer d'agréables ombrages, de l'eau, et des bassecours. Il y a huit mois que je travaille. Je ne suis pas trop avancé. J'attends votre jardinier pour embellir nos jardins. Je donneray cent livres de Geneve qui font 165lt de France.

Je suis fâché que M. le maréchal de Richelieu ne fasse plus le voiage de Languedoc. Je l'aurais été voir, et je vous aurais embrassé à Lyon si ma mauvaise santé me l'avait permis. Peutêtre aura t'on le bonheur de vous revoir à Geneve l'année prochaine. Le vin de Baujolois s'est gâté dans les tonnaux. Je soupçonne monsieur Mallet d'avoir fait faire de très mauvaises caves. Tout avait besoin de réparation et d'augmentation dans cette maison où L'on disait que rien ne manquait. Le vin de Serriere était admirable, mais il est bu. Nous ferons tirer en bouteilles le vin que vous voudrez bien nous envoier.

Voulez vous bien quand vous verrez mr de Gaufecourt luy dire qu'il a sur les bords du lac deux amis qui luy sont attachez pour jamais. Mille compliments à mr Camp et à mr votre neveu.

Les nouvelles de Cadix sont aussi mauvaises pour les intéressez que celles de la Méditerranée.

Je vous prie de me marquer si la petite somme sur un nommé mr Romancan a été payée.

Avez vous entendu parler de cette maudite pucelle, de st Denis, et de st George? On dit tout cela imprimé et dieu sait comment! je ne peux que protester et rester tranquile.

Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.

On a mis le scellé dans ma maison de Monrion où ce pauvre Gies est mort. Je suis bien malade aux prétendues Délices.