1755-08-15, de Ami Camp à François Tronchin.

Mr Votre frère me Charge Monsieur de vous rendre Compte de La Conversation qu'il a eu avec Grasset en ma présence.
Nous avons eu occasion de Le voir parce que par une suite des services que mr Votre frère a toujours rendu à mr Bousquet il lui en a demandé un nouveau d'un petit Crédit en Espagne pour servir à Grasset dans le voyage qu'il y va faire pour Leur Comerce.

Mr Vr͞e frère a eu pour objet en luy parlant, de L'empêcher de travailler à L'Impression de la P. ou de La favoriser en aucune manière, dans la Crainte que si cet ouvrage étoit public cela ne fit du Chagrin à Mr De Ve.

Dans cette Vüe après avoir fait sentir à G. tout le tort qu'il a eu dans La scène qu'il vient de donner à Geneve par son imprudence et une Cupidité des plus déplacées, il Lui a recommandé de bien prendre garde à La Conduite qu'il tiendroit à L'avenir, parce qu'il pouvoit compter que s'il s'immisçoit en aucune façon de cet ouvrage il pourroit bien finir ses jours en prison, que Mr De V. ne manquoit pas de puissans protecteurs qui sauroient le déterrer où qu'il fût; Mr Vr͞e frère Lui a aussi représenté fortement que si L'avidité du gain le rendoit Capable de se mêler de L'impression de Ces Livres qu'on ne peut vendre que sous Le manteau il étoit perdu sans ressource & qu'il pouvoit renoncer à tout établissemt avec Bousquet dans nôtre pays; en un mot rien n'a été négligé de tout ce qui peut éloigner G. de se mêler de la P.

Il a parû frappé de tout ce que Mr Vr͞e frère Lui a dit & l'a assuré de La manière la plus forte que de sa vie il ne contribueroit à L'impression de cet ouvrage, qu'il lui en donnoit sa parole d'honneur comme il l'avoit déclaré à Geneve, & que quand il en auroit eu L'idée L'intérêt que Mr Vr͞e frère prend à ce qui regarde Mr De Ve suffisoit pr L'en détourner, vû le Cas qu'il fait de ses avis & Les obligations que mr Bousquet Lui a; il nous a ajouté qu'il n'avoit pas Connoissance que personne travaillât à cette Impression.