Je n'ai pas manqué Monsieur d'envoier le même jour à la poste d'Angleterre votre lettre pour Mylius; et cela avec d'autant plus d'empressement que je savois que le pauvre diable a fort besoin d'argent.
Il ne m'en a pas encore accusé la réception, mais je ne doute pas qu'il ne l'ait reçuë. J'attens néanmoins de ses nouvelles incessamment, dont je vous ferai part, si je puis suposer qu'elles vous intéressent.
Voltaire m'a écrit. Il est à Strasbourg et n'ose pas venir à Paris; le roi de Prusse l'en écarte. Il me dit qu'on lui a enlevé à Francfort plus de 500 carolins et il ajoute que c'est par une suite de la loi de l'Epargne. Maupertuis se tient toujours à Paris, il a voulu être plaisant, à nos dépens. Il a composé l'histoire de notre dispute sous le titre de la querelle, et il l'a luë chez Falconet aux beaux esprits qui s'y assemblent, mais on lui a dit qu'il ne faut pas qu'il traite le même sujet après Akakia. A Berlin ils ne savent où ils en sont s'ils auront Maupertuis ou d'Alembert pour président. Avés vous vu cette Epigramme sur le R. de P.?
On dit que les satires pleuvent contre lui à Paris, mais je n'en ai pas pu voir encore. On assure que Mylord Marschal assure à Paris que les procédés que Freytag a tenu envers Voltaire à Francfort n'ont pas été conformes aux ordres du R., mais Voltaire assure le contraire, et paroit fort persuadé que Freytag n'a fait que ce qu'on lui avoit ordonné de faire. On débite que Voltaire se retirera en Suisse, mais il ne m'en dit rien. Peut être en saurés vous davantage. Je finis et suis avec beaucoup de considération et une parfaite amitié
Monsieur
Votre très humble serviteur
J. Koenig
à la Haye le 17 7bre 1753
P. S. Que dites Vous de la mort de Richmans par un coup d'Electricité! Qu'est ce que la cure de Plauner dont une gasette allemande parle?