1753-08-21, de Cosimo Alessandro Collini à Johann Carl von Fichard.

Monsieur,

Monsieur de Voltaire étant trop malade pour avoir l'honneur de vous écrire, je prends cette liberté pour vous supplier d'interposer au moins vos bons offices dans une affaire où vous pouvez tout.

Vous savez, Monsieur, qu'il n'y avait nul ordre de m'arrêter à Francfort, vous savez que je l'ai été, qu'on s'est saisi de tout l'argent qui était dans mes poches, aussi bien que de celui que Monsieur de Voltaire avait sur lui. On m'a pris la valeur de vingt-cinq Carolins, c'est une petite somme, mais c'est tout mon bien. Si messieurs Freytag et Schmidt éxigent des frais pour un emprisonnement aussi injuste que celui de Monsieur de Voltaire, de Madame Denis, et le mien, ces frais ne se montent pas à deux-cent florins, et il reste assurément du surplus que ces messieurs ne doivent pas retenir. Il est aisé au sieur Schmidt de faire rendre cette somme dans Strasbourg par un banquier son Correspondant. Je suis persuadé qu'il ne refusera pas cette justice, surtout quand vous daignerez, Monsieur, avoir la bonté de lui en parler. Je suis sujet de Sa Sacrée Majesté Impériale, Citoyen de Florence, et d'une bonne Famille. Ces titres, et mon malheur pouront quelque chose auprès de vous. Nous ne prétendons point vous compromettre. Le Roi de Prusse qui n'a pas approuvé la conduite de ses Agents, aprouvera assurément qu'on nous rende l'argent qu'on ne doit pas nous retenir. Un mot de vous terminerait cette affaire à l'amiable. J'ose vous demander cette grâce.

Je suis avec tout le respect,

Monsieur,

Votre très humble et très obéïssant serviteur

Colini secrétaire de Mr. de Voltaire