1753-02-16, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Baptiste de Boyer, marquis d'Argens.

Je me meurs, mon cher marquis, et j'ai la force de vous avouer ma faiblesse.
Je ne vous nierai pas certainement que ma douleur est inexprimable. J'ai voulu me vaincre et venir à Potsdam, mais je suis retombé la veille de mon départ dans un état dont il n'y a pas d'apparence que je relève. Mon erysipèle est rentré, la dyssenterie est survenue, j'ai souvent la fièvre; il y a quatorze jours que je suis dans mon lit. Je suis seul, sans aucune consolation, à quatre cents lieues d'une famille en larmes à qui je sers de père. Voilà mon état. Je compte sur votre amitié, qui fait presque ma seule consolation, et je vous embrasse tendrement.