J'ay été bien malade, mon cher et respectable ami, je le suis encore.
Le Roy de Prusse m'a envoyé de l'extrait de quinquina.
Il devrait bien plustôt m'envoyer une permission de partir, pour aller me guérir ou mourir ailleurs. Il n'a plus nul besoin de moy. Il sait àprésent mieux que moy la langue française, il écrit français par un a, il fait de bonne prose et de bons vers. Il a écrit sans me consulter une philippique sur la querelle de Maupertuis. Il l'a pris pour Auguste, et moy pour Marc Antoine. Maupertui l'a fait imprimer en allemand, et en italien, avec les aigles prussiennes à la tête. Battu à Actium, et à la tribune aux harangues, il ne me reste qu'à aller mourir dans cette terre que vous me proposez, et de vous embrasser avant ma mort. Voicy une espèce de testament littéraire que je vous envoye. Mille tendre respects à tous les anges.
V.
Je vous prie de donner copie de mon testament.
[10 février 1753]