Faible réponse à votre belle ode en attendant que j'aye l'honneur de la renvoyer avec très peu d'apostilles.
La mère de la mort, la vieillesse pesante
A de son bras d'airain courbé mon faible corps
Et des maux qu'elle entraîne une suitte effrayante
De mon âme mortelle attaque les ressorts.
Je brave vos assauts redoutable vieillesse.
Je vis auprès d'un sage et je ne vous crains pas,
Il vous prêtera plus d'appas
Que le plaisir trompeur n'en donne à la jeunesse.
Coulez mes derniers jours sans trouble et sans terreur,
Coulez près d'un héros dont le mâle génie,
Nous fait goûter en paix le songe de la vie,
Et dépouille la mort de ce qu'elle a d'horreur.
Ma raison qu'il éclaire en est plus intrépide,
Mes pas qu'il a guidez en sont plus afermis,
Un mortel que Pallas couvre de son Egide
Ne craint point les dieux ennemis.
Philosofe des rois! que ma carrière est belle!
J'iray de Sans Soucy par des chemins de fleurs
Aux champs Eliziens parler à Marc Aurele
Du plus grand de ses successeurs.
A Salluste jaloux je liray votre histoire,
A Licurgue vos loix, à Virgile vos vers;
J'étonneray les morts: ils ne pouront m'en croire.
Nul d'eux n'a rassemblé tant de talents divers.
Mais lorsque j'auray vu ces ombres immortelles
N'allez pas après moy confirmer mes récits.
Vivez, rendez heureux ceux qui vous sont soumis,
Et n'allez que fort tard auprès de vos modèles.
V.
3 octbre 1751