1751-02-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Graf Samuel von Cocceji.

Je représente très humblement à son Excellence qu'étant aussi malade que mon avocat, je n'ay pas laissé de dresser ce mémoire que je suplie son Excellence de lire.

Si elle juge que ce mémoire soit dans la forme convenable, je feray signer vidi par mon avocat.

Si le mémoire est trop court et trop faible les lumières de son Excellence et des juges y suppléeront.

Tout ce procez est une matière de fait, et peutêtre le peut on juger sans la présence de mon avocat.

Messieurs les juges y verront huit faussetez criminelles du juif Hirshell.

1. sur les lettres de change qu'il devoit rendre immédiatement après le 16 Xbre,
2. sur le billet du 27 Xbre qui le condamne et qu'il dit avoir jetté,
3. sur la bague qu'il dit luy avoir été arrachée par force,
4. sur l'écrit du 24 qu'il dit écrit de ma part après coup, et en fraude,
5. sur le billet du 19 dont il a nié la signature,
6. sur ce même billet du 19 qu'il ose m'accuser d'avoir altéré,
7. sur la prétendue attestation de Reklam que Reklam n'a pas donnée,
8. sur la fausse datte insérée dans cette attestation.

Reklam est à présent à Brunswik pour un mois, mais sa famille témoin de ce que j'avance est prête de faire serment.

Pour moy je suis prest à être jugé et je consens de l'être sans que mon avocat et moy soions présents, m'en remettant uniquement à l'équité et aux Lumières de messieurs les juges et surtout de son Excellence.

Voltaire

Tout ce que je demande instamment c'est que Hirshell avoue ses calomnies et me fasse une réparation convenable.