[à Versailles 10 mars 1750]
On m'a renvoyé icy vos ordres.
Je suis à Versailles enfin. Je n'y avois pas mis le pied depuis la perte de votre amie. J'étois resté dans sa maison, je n'en sortois pas, elle me servoit de tombeau. Je m'étois présenté quelquefois à votre porte, mais ne dînant point et sortant tard je n'ay point eu la consolation de vous entretenir.
J'aprends dans le moment que Pouilly, mon ancien amy, le frère de Champeau, votre protégé, vient de mourir. On n'est entouré que de désastres. On voit tomber à droitte et à gauche comme dans une mêlée et on reçcoit enfin le coup après avoir fatigué inutilement sa vie. Venons à M. de Contade, qui mourra aussi bientôt à son tour ainsi que moy. Il suffit que M. le marquis Dargenson me donne un ordre sur son compte pour que je fasse mes affaires des siennes. Croyez que j'auray toujours pour vous le tendre et respectueux attachement qu'on fait semblant d'avoir pour les gens en place. J'auray l'honneur de vous soumettre à Paris touttes les idées que j'ay pour servir mr de Contade s'il veut être servi. Vous me damanderez peutêtre ce que je fais à Versailles. Je voi le roy passer un moment et le reste du temps je travaille dans ma chambre.
Tuus ero semper, tuus non aulicus.
V.