Trianon, ce 17e [April 1749] au soir
C'est assurément aujourd'hui le plus beau jour de ma vie, je n'ai plus d'humeur, je ne vous reproche plus rien, je suis trop heureuse, voilà la gratification de Mr d'Argenson que je reçois dans ce moment.
Mr de Paulmi est un home charmant, je l'aime à la folie; je n'ai point paru, Mr d'Argenson ne sait pas qu'il me rend la plus heureuse persone du monde, il croit n'obliger que son neveu. Je suis au désespoir de ne l'avoir pas reçue asés tost pour la poste d'aujourd'hui, elle ne partira que par celle de samedi, je vous suplie de la toucher tout de suite; vous pouvés, si vous ne voulés pas aller à Nanci, la faire toucher par qui vous voudrés, en mettant je crois votre nom au dos; on vous le dira. Je suis bien sûre de celle du roy de Pologne, ainsi j'aurai deux beaux jours dans ma vie. Je vous avoue que quelqu'espérance que m'eût donné Mr de Paulmi j'ay doutté de celle cy jusqu'à ce que je l'aie tenue. Je vous envoie sa lettre, car je fais contresigner le paquet pour plus de sûreté. Vous recevrés encore une lettre de moi cette poste-cy, le p. n'a encore vu ni Mlle La Roche-sur-Ion, qui est ici pour le r. de P., ni moi; le roy est à Choisi, il n'i a pas un ministre ici, et le prince reste à Paris; je voudrois, cependant, bien qu'il vît Mlle La Roche-sur-Ion. Adieu, je vous avoue que je suis au comble de ma joie.