1748-02-01, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mes divins anges ont ils reçu des copies bien pleines de fautes de cette Sémiramis qu'ils ont prise sous leur protection?
Me voicy donc à Luneville! et pourquoy? C'est un homme charmant que Le Roy Stanislas, mais quand on luy joindroit encor le roy Auguste, tout gros qu'ils sont, dans une ballance, et mes anges dans l'autre, mes anges l'emporteroient. J'ay toujours été malade, cependant ordonnez, et s'il y a encor des vers à refaire je tâcheray de me bien porter. Mr de Pondevelle et mr de Choiseuil sontils enfin contents de ma reine de Babylone? comment va leur santé? sont ils bien gourmans? Ouy, et ensuitte on prend de l'eau de tilleul. C'est ainsi à peu près que j'en use depuis quarante ans, disant toujours, j'auray demain du régime. Mais madame du Chastelet qui n'en eut jamais se porte merveilleusement bien. Elle vous fait les plus tendres compliments. Je ne sçai si elle ne restera point icy tout le mois de février. Pour moy qui suis une petite planette de son tourbillon, je la suis dans son orbite cahin caha, et quoy que je mène icy la vie la plus douce et la plus commode je reviendray avec délices vous faire ma cour. Adieu mes adorables anges, je vous seray fidèle jusqu'au dernier moment de ma vie et votre culte sera toujours dans mon coeur.

V.