à Berlin 4 [3] octobre 1743
Pour moy mon adorable ministre, j'ay suivi à Bareith l'Orphée couronné. J'y ay vu une cour où tous les plaisirs de la société, et tous les goûts de l'esprit sont rassemblez. Nous y avons eu des opéra, des comédies, des chasses, des bals, des soupers délicieux. Ne faut il pas être possédé du malin pour aller s'exterminer vers le Rhin ou vers le Danube aulieu de couler ainsi doucement sa vie?
Je compte repasser incessament par le pays dont vous faites les délices. Ce n'est pas mon plus court; mais je ferois un détour de cinq cent lieues pour venir vous embrasser, pour jouir de votre aimable commerce, pour vous jurer un attachement éternel.
Notre monseigneur Crescenci a donc donné partout des bénédictions, aulieu d'argent dans les auberges.
J'ay eu l'honneur de souper hier chez le roy avec Monsieur votre oncle. M. de Botta n'étoit pas du soupé. Je ne sçais comment cela se peut. J'attends avec impatience le moment de vous revoir. Conservez moy vos bontez et celles de vos amis, et comptez pour jamais sur le tendre et respectueux attachement de
V . . . .
J'ay montré au roy votre aimable lettre. Il n'est pas fâché d'avoir un ministre qui écrit aussi joliment que luy même.
ce 4 octobre
Je viens de dîner chez la reine mère avec votre aimable oncle. Je pars le 11 ou le 12. Je vous suplie de vouloir bien remercier pour moy mr de Desbrosses, qui m'a envoyé des lettres de recommandation pour Dresdes; mais je n'en pouray profiter. Adieu, je suis à vous pr jamais.
Le petit Pascal s'est presque cassé la jambe à Bareith. Je le renvoye par eau de Bareith à la Haye.