1742-06-20, de Frederick II, king of Prussia à Voltaire [François Marie Arouet].
Ce Bork enfin est revenu
Après avoir beaucoup couru.
Entre les beaux bras d'Emilie
Il m'assure vous avoir vu
Le corps maladif, abattu,
Mais toujours l'esprit plein de vie
Et de cette aimable saillie
Qui vous a rendu si connu
Depuis ce pays malotru
Jusqu'à Paris votre patrie.
Enfin le vieux Broglie a perdu
Non pas sa culotte salie
Dont personne n'aurait voulu,
Mais brusquement tournant le cu
Devant les Pandours de l'Hongrie,
Fuyant avec ignominie,
Il perd tout sans être battu
Et sous Prague il se réfugie.
Le jeune Louis l'a fait duc
Pour honorer son savoir faire:
S'il l'eût été par l'archiduc,
Ce serait moins extraordinaire.

Notre genre de vie est assez différent de celui de Versailles et plus encore de celui de Remusberg. Aujourd'hui un ambassadeur est venu me faire des propositions, hier il en parti un chargé de fumée, et demain il en arrivera un autre avec du galbanum. On amena hier matin une quarantaine de Talpasches prisonniers, d'ailleurs les plus jolis garçons du monde. Nos housards vont actuellement battre la campagne pour amener des paysans, des chariots et des vivres: nous faisons transporter nos blessés et nos malades pour le pays où nous les suivrons bientôt.

Puissiez vous jouir sans discontinuation d'une santé ferme et vigoureuse; puissiez vous plus philosophe que vous n'êtes, préférer la solitude de Charlotenbourg aux charmes du palais d'Armide que vous habitez. Puissiez vous être le plus heureux des mortels comme vous en êtes le plus aimable! Ce sont les souhaits que vous fait un ancien ami du fond de son cœur; adieu.

Federic