A la Haye, ce 22 septembre [1740]
J'envoie à mon adorable maître l'Anti-Machiavel tel qu'on commence à présent à l'imprimer; peut-être cette copie sera-t-elle un peu difficile à lire, mais le temps pressait; il a fallu en faire pour Londres, pour Paris et pour la Hollande, relire toutes ces copies et les corriger. Si votre majesté veut faire transcrire celle-ci correctement, si elle a le temps de la revoir, si elle veut qu'on y change quelque chose, je ne suis ici que pour obéir à ses ordres. Cette affaire, sire, qui vous est personnelle me tient au cœur bien vivement. Continuez, homme charmant autant que grand prince, homme qui ressemblez bien peu aux autres hommes, et en rien aux autres rois.
M. de Fénélon vint avant hier chez moi pour me questionner sur votre personne; je lui répondis que vous aimez la France et ne la craignez point; que vous aimez la paix et que vous êtes plus capable que personne de faire la guerre; que vous travaillez à faire fleurir les arts à l'ombre des lois; que vous faites tout par vous même, et que vous écoutez un bon conseil. Il parla ensuite de l'évêque de Liége et sembla l'excuser un peu, mais l'évêque n'en a pas moins tort, et il en a deux mille démonstrations à Maseck.
Je suis, &c.