2 janvier 1739

…J'ai lu la réponse de l'abbé Desfontaines à Voltaire.
Pour un homme d'esprit, il s'est furieusement oublié. Je ne sais où il a été ramasser toutes les pouilles et toutes les ordures qu'il vomit contre lui. Est ce de cette façon qu'un homme qui sait écrire doit répondre? Quand la passion nous aveugle, elle nous ôte la raison. Je suis très fâché qu'il vous ait compromis dans son infâme libelle; vous ne sauriez croire le tort qu'il vous a fait. Il a indisposé beaucoup de personnes contre vous. ‘Est ce là cet homme’, m'a-t-on dit, ‘que vous nous annonciez si doux, si pacifique, qui n'avait plus d'autre vue que de venir couler tranquillement dans sa patrie le reste de ses jours? Quel étrange ami a-t-il choisi? Un homme généralement méprisé de tous les honnêtes gens et qu'on ne peut voir sans rougir, qui le nourrira de fiel et lui fera des ennemis partout.’ Vous êtes prudent et sage, mon cher ami, mais vous vous livrez trop à votre bon cœur. Observez vous le plus que vous pourrez: tout le monde a les yeux sur vous et l'on profitera de vos moindres fautes pour vous refuser une grâce qu'on aurait dû vous avoir accordée. Excusez ma franchise; elle a pour source l'amitié: si je vous aimais moins, je craindrais moins pour vous….