1738-12-01, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Nous venons de recevoir le paquet du Prince, lequel prince un jour doit vous acheter cent mille écus, s'il en donne sept mille pour un être non pensant haut de six pieds.
J'étois bien pressé avant hier en vous écrivant toutes mes contrecritiques. Pardonnez

Mais je lèche en criant la main qui me censure.

Apropos nous avons demandé aux valets de chien si les chiens peuvent crier quand ils lèchent. Il disent que cela est aussi impossible que de sifler la bouche pleine.

Epître sur la nature du plaisir.

Renvoyez moy 8 vers qui suivent celuy cy,

Que di je? à nos plaisirs! c'est à la douleur même.

J'en ay besoin. Je n'en ay plus de copie.

Comment va l'enfant prodigue? Vos amis sont ils revenus de la critique de Fierenfat? Un nom doit il choquer? et ignore t'on que dans Menandre, Plaute et Terence tous les noms annoncent les caractères? et qu'Arpagon signifie qui serre? etc.

Madame Croupillac n'est elle pas nécessaire à l'intrigue puisque c'est elle qui apprend à l'enfant prodigue toutes les nouvelles? et n'est il pas plaisant et intéressant tout ensemble que cette Croupillac luy dise bonnement du mal de luy même?

Messieurs les critiques j'en apelle au parterre. Adieu, laissez moi le droit de regimber, mais donnez moy toujours cent coups d'éguillon.

Vale, te amo.