J'ai Reçu votre lettre du 20.
Je ne me plains donc plus du correspondant. Je vous prie mon cher paresseux, qui ne le serés plus de prier par un petit mot de lettre mr Berger de passer chez vous pour affaire. On a de ses nouvelles à l'hôtel de Soissons. Cette affaire sera que vous lui compterés dix pistolles. Vous lui demanderés de vous même un Billet par lequel il reconnoitra avoir reçu cent livres de mes deniers par vos mains. Je remets à votre prudence et à votre esprit le soin de lui faire sentir doucement que quoique les plaisirs que je lui fais soient peu considérables, cependant vous ne laissés pas d'être surpris de la manière peu mesurée dont il parle de moi en votre présence, et qu'un cœur comme le mien méritoit des amis plus attachés. Je vous prie de m'envoyer incessamment une demie douzaine d'exemplaires de la nouvelle édition d'Œdipe. Vous n'aurés Merope que dans un mois. Je ne crois pas que les approbateurs puissent vous inquietter quoiqu'elle soit sous mon nom. Je vous prie de bien déclarer qu'il est très faux que Maximilien soit de moi. Je n'aime point à me charger des ouvrages des autres.
Je suis très étonné de la difficulté que l'on fait pour la chose en question: mandés moi quel remède on y peut aporter. J'attends les livres que vous m'avés promis. Je vous prie d'être exact dans notre commerce. Je vous aimerai de tout mon cœur.
Voltaire
à Cirey ce 24 février 1738