a Nauen, ce 25 de Mai 1737
Monsieur,
Je viens de munir mon cher Cesarion de tout ce qu'il lui faloit pour faire le voyaje de Cireÿ, il vous randera ce portrait que Vous vouléz avoir absolument.
Il n'y a que la malheureuse matérialité de mon corps qui empêche mon esprit de L'acompagniér.
Cesarion à le malheur d'estre né Courlandois, mais il est le Plutarque de cette Beocie moderne; je Vous le recomande au possible, confiéz vous entièrement à lui, il à le rare avantage, d'estre home d'esprit et discret en même tems. Je dirai en le voyant partir,
Si j’étois envieux, je le cerois du Voyage que Cesarion va faire. La seulle chose qui me Consolle est l'Idée de le Voir revenir, come ce chef des Argonautes qui emporta les Trésorts de Colcos; quelle joye pour moi quand, il me randera, la pucelle, Le Regnie de Louis 14, La Philosophie de Neuton, et les autres Merveilles incognues, que Vous n'avéz pas voulu jusqu’àprésent comuniquér au public. Ne me privéz pas de cette consolation, vous qui désiréz si ardemment le bonheur des humains, voudryéz vous ne pas contribuér au mien? Une lecture agréable entre celon moi pour beaucoup dans L'idée d'un vrai bonheur.
Cesarion Vous randra compte de L'estime parfaite que j'ai pour Vous, il Vous dira jusque à quel point Nous honnorons la vertu, le mérite, et Les tallents; croyéz je vous prie tout ce qu'il Vous dira de ma part, et soyéz sûr qu'on ne peut egsagérér la considération avec la quelle je suis,
Monsieur,
Vostre très affectioné ami
Federic
Il est bien juste que Vous assuriéz de mes atantions VENUS NEUTON. La Science ne pouvoit jamais se logér mieux que dans le corps d'une aimable personne; quel Philosophe pouroit résister à Ses arguments? En se laisant, guidér par cet aimable Philosophe La Raison nous guideroit Elle toujours? Pour moi je redouterois fort les flèches dorées du petit Dieu de Citere.