au Camp de Grotkau ce 2 de juin 1741
Vous qui possédez tout les arts
Et surtout Le talent de plaire,
Vous qui penséz à nos huzards
En coeuillant des fruits de Cithere,
Qui Chantéz Charles et Neuton
Et qui du giron d'Emilie
Aux beaux esprits donnéz le ton
Ainsi qu'à La philosofie.
De ce Can d'où mainte ploton
S'exserce en tirant à L'envie
De ma très Turbulente vie
Je vous fais un Léger Crayon.
Nous avons vû Cesarion,
Le Court Jourdan qui L'acompagne
Tenant en main son Ciceron,
Horace, Hipocrate, et Montagne.
Nous avons vûs des Maréchaux,
Des beaux esprits et des héros,
Des Bavardeurs, des politiques,
Et des soldats très Impudiques.
Nous avons vûs dans nos Traveaux
Combats, escarmouches, et sièges,
Mines, fougaces, et cent pièges
Moisonér Madame Atropos,
Faisant rage de ses ciseaux
Parmi la cohue imbécile
Qui suit d'un pas fier et docile
Les traces de ses généraux.
Mais si j'avois vû davantage
En seraije plus fortuné?
Qui pense et jouit à mon âge,
Qui de Vous est endoctriné,
Mérite seul le nom de sage,
Mais qui vous peut voir de ses yeux
Mérite seul le nom d'heureux.
Ni mon frère Ni ce Knobelsdorf que vous connaiséz n'ont étéz à L'action. C'est un de mes Cousins et un Major Knobelsdorf des Dragons qui ont eu le malheur d'être tuéz.
Donnez moi plus souvent de vos nouvelles. Aimez moi toujours, et soyez persuadé de l'estime que j'ai pour vous. Adieu.
Federic