ce 24 Xbre [1736]
Je ne vous écris point de ma main mon cher amy parce que je me trouve un peu mal.
J'ay receu une nouvelle Lettre du prince royal baucoup plus pleinne encor de bonté que la première, et ce qui vous surprendra c'est qu'elle est écritte avec la correction et l’élégance d'un Français homme d'esprit dont le métier seroit d’écrire. Jamais de si grands sentiments n'ont été si bien exprimés. Je vous en envoyeray une copie. Je sçais combien votre cœur y sera sensible. Votre correspondance avec ce prince est en vérité ce qui pouvoit vous arriver de plus flateur dans votre vie. J'ay pris la liberté de luy écrire qu'il ne pouvoit faire un meilleur choix. Vous verrez par sa lettre, qu'il m'honore de quelque confiance. Je suis très persuadé qu'un jour votre employ auprès de luy, ne sera pas borné aux seules belles Lettres.
Ma mauvaise santé m'empêchera de luy faire ma cour cet hiver. Je pourais bien aller aux Eaux d'Aix la Chapelle; écrivez moy des nouvelles de votre parnasse. La poste va partir, je n'ai pas le temps d’écrire à Mr Berger. Je vous prie de l'assurer de ma tendre amitié et de luy dire que je luy demande en grâce de m’écrire des nouvelles une fois la semaine.
Mon adresse est à Mr de Revol, chez Mr Hellin, Banquier à Anvers.
Je vous demande à vous et à Mr Berger un profond secret sur notre commerce et sur cette adresse. Je vous embrasse. Comptéz que vous n'aurez jamais d'amy plus tendre que moy.
V.