[? 11 February 1736]
Je change c'est deux vers de Zamore.
La nature grossière en formant ses apas
Luy laisse un cœur sauvage et fait pour ces climats,
en cecy pr l'impression,
Je crains moins ce cœur simple et plein de vérité
Que le fard dangereux d'un dehors emprunté.
2º au troisième acte je faisois dire à Gusman,
Vous que j'aimais assez pour en être jaloux.
Je substitue
Vous que j'aime enfin, vous dont je suis jaloux.
Je vous demande en grâce de conserver ce morceau.
3º acte quatrième. Je vous suplie très instamment de faire remettre les vers suivants,
Compte à jamais au moins sur ma reconnoissance,
Sur ma foy, sur les vœux qui sont en ma puissance,
Sur tous les sentimens de plus juste retour
S'il en est après tout qui tiennent lieu d'amour,
Partant de grandeur d’âme éprouve mon courage,
Peut être une Espagnole eût promis davantage.
Elle eût pu prodiguer des serments et des pleurs.
Je n'ay point leurs attraits et je n'ay point leurs mœurs.
Comptés que le vers de Gusman ne vaut rien, est déplacé et que c'est une malheureuse interruption.
En peut il être hélas, qui tienne lieu d'amour
fait le malheur de ma vie et que si il étoit imprimè je reviendray à Paris pour brûler la pièce.
4º acte cinquième. Alvares ne dira plus
Vis pour elle et pour moy, sauve Alzire à ce prix,
Si tu te rends chrétien le ciel me rend un fils,
mais il dira
Sauve toy pour moy même, accorde moy ce prix
Et du salut d'Alzire et du sang de mon fils.
Je persiste opiniâtrement dans tous le reste. S'il est encor temps que Mr de la Mare puisse porter ces changements aux comédiens à la bonne heure, sinon en cas que la pièce ne batte plus que d'une aile, je vous suplie de faire dire aux comédiens que je leur abandonne et que je les prie de ne la plus jouer.