Le 7 mars 1731
Une apologie, telle que la vôtre, monsieur, est trop flatteuse pour pouvoir se figurer qu'on la mérite.
C'est à d'autres ouvrages plus polis et plus limés que ce petit essai, qu'elle est légitimement due. Votre approbation, monsieur, doit servir à me donner de l’émulation. Elle doit aussi me porter à me familiariser plus intimement avec notre langue. Il serait à souhaiter que je pusse la manier avec autant d'art et de délicatesse que vous le faites. Je pourrais avec raison m'assurer du succès avant même que d'avoir entrepris; mais un succès si prompt et si rapide n'est réservé qu’à vous. Ces heureux talents que vous possédez vous sont de sûrs garants des justes applaudissements que vous recevez. Egalement habile tant en prose qu'en vers, vous avez su réussir dans l'un et dans l'autre genre, d’écrire et mériter l'estime des gens de lettres. Ce magnifique poème, ces superbes tragédies que vous avez mises au jour, font l'admiration publique, ainsi que la vie de cet illustre prince, aussi recommandable par ses actions héroïques que par ses vertus, sans oublier tous ces autres ouvrages qu'on a lus, avec d'autant plus de plaisir qu'ils consacrent votre nom à l'immortalité.
On y voit briller partout ce génie fécond, cet art admirable, cette fine délicatesse, sans laquelle les ouvrages languissent et restent dans l'oubli. C'est à la nature, monsieur, et à vos travaux infatigables que vous devez ces grands talents, ces richesses immenses dont vous avez fait provision, et que vous avez répandues avec libéralité aux amateurs des belles lettres. C'est un bienfait dont ils seront toujours reconnaissants, aussi bien que mon traducteur et moi qui sommes avec un attachement inviolable, vos très humbles serviteurs.