Paris le 8 août 1827.
Que Dieu soit béni mille fois, monsieur et vénérable ami, de ce qu'il vous a conservé au monde qui a si grand besoin de vous, à votre digne frère, et à des amis parmi lesquels je ne le cède à aucun dans le tendre attachement à votre personne, non plus que dans la vénération pour votre beau génie.
Je vous peindrais mal les angoisses où m'a jeté l'article du journal qui m'a appris en même temps votre danger et votre maladie. Ces inexprimables angoisses ont duré jusqu'au moment où l'on m'a pleinement rassuré sur vos jours au bureau du Mémorial. Depuis assez longtemps je me plaignais de votre silence, et malgré ce que m'avaient dit de votre santé et M. de Vitrolles et Mme de Talaru, j'étais fort éloigné, assuré-
ment, de soupçonner une excuse qui a pensé n'être que trop cruellement valable.
Au nom de Dieu, modérez votre ardeur pour le travail, qui a peut-être causé cette maladie; et foulez aux pieds l'injustice des hommes, qui ne sont pas dignes de vous causer des chagrins. Je me sens trop ému, et incapable de vous en dire davantage aujourd'hui. De grâce, faites-moi donner des nouvelles de votre convalescence, et ne m'écrivez que lorsque vous le pourrez sans nulle fatigue. Mme de Coriolis et mon plus jeune fils, qui est auprès de moi, ont partagé toutes mes sollicitudes.
Faut-il vous répéter que c'est plus, que jamais que je vous suis attaché, de tout mon cœur comme de toute ma raison?