1827-07-27, de Abbé Philippe Gerbet ; Félicité de Lamennais à Monsieur le Comte de Senfft.

Monsieur le comte,

Ma lettre de la semaine dernière vous annonçait la maladie de M. Féli, et au moment où je vous écrivais son état n'était pas tel que je dusse vous alarmer :

il ne le pensait pas. Mais depuis! Une fièvre bilieuse, avec les spasmes, d'abord tierce, puis continue, des évanouissements, et maintenant une effrayante faiblesse. Dès le commencement de la maladie, M. Blaize est venu. M. l'abbé Jean est arrivé ces jours-ci : nous sommes dans une consternation mortelle. Je voudrais pouvoir croire que notre affection grossit encore à nos yeux le danger de son état : mais je ne le puis. Si je ne vous ai pas écrit plus tôt, c'est que j'attendais de jour en jour quelque mieux à vous annoncer. Ne croyez pas, cependant, que toute espérance soit perdue : non, non. J'avais foi en ce qui lui restait à faire pour accomplir sa mission, et je conserve encore cette foi : mille hommages. Je frémis à la pensée de la douleur que vous porte ma lettre.

P. S. de samedi matin 28. — Un changement notable dans l'état du cher malade nous a fait passer de la plus profonde tristesse à beaucoup d'espérance. Point ou presque point de fièvre; les forces reviennent. — Je vous écrirai par le prochain courrier, qui part de Dinan mardi.

Deux heures et demie de l'après-midi. — Un symptôme ardemment désiré vient de se manifester : M. l'abbé Jean pense que le cher malade est sauvé. Je suis bien porté à partager cette espérance.— Si j'avais le temps, je recommencerais ma lettre pour supprimer ce que j'ai écrit hier de trop alarmant : mais l 'exprès qui doit la porter à Dinan n'a plus que le temps nécessaire pour y arriver avant le départ du courrier.