[p. 2] Ce samedi
Chère amie,
Je suis si enfoncé dans mon travail pour finir mes petits tableaux1 que je remets toujours toute chose. J’avais pourtant à cœur de te remercier de ce que tu as fait2, quoique je pense que malgré toutes les machines que nous remuons, et pour quel résultat, nous n’y parviendrons pas. Ces gens-là sont décidés à ne pousser que leur clique. Surtout, je t’en prie bien, amie, ne pousse pas trop ce pauvre Haro qui est plein de cœur et qui néglige ses affaires pour les miennes3. Il a plus besoin d’aide que moi. Je suis fâché d’une persistance qui lui fait positivement négliger ses intérêts.
[p. 3] Vieillard 4 est une mâchoire à qui je t’avertis que je n’aurai nulle obligation même si je réussis : il fait tout du bout des dents et pour me servir à son sujet d’une expression qu’il affectionne, je le trouve classé – Toi, je t’aime toujours et reviendrai bientôt. Nous verrons cet ouvrage dont tu me parles et dont je te remercie à l’avance. Je t’écris au galop. Croirais-tu qu’ici le temps me manque ? Il me faut près de deux heures pour faire seulement ma palette. À la vérité, cela facilite beaucoup mon travail ensuite, mais je suis sur les dents quand j’ai fait ma journée et je n’ai pas même le courage d’aller chez les voisins Barbier . Je reviendrai dans huit jours rapporter mes [p. 4] petits tableaux : j’en suis encore à me demander s’ils seront finis5.
Je t’embrasse et te remercie mille fois, chère bonne amie, et saint Eugène6 aussi. À bientôt.