1778-05-19, de Philippe Antoine de Claris, marquis de Florian à Pierre Michel Hennin.

…En vous perdant, monsieur, en perdant m. de Voltaire et madame Denis, nous perdons, à peu près, tout ce qui pouvait nous attacher dans ce pays; cependant nous y demeurons et nous y demeurerons encore longtemps: l'arrangement de nos petites affaires exige que nous y passions encore l'hiver prochain, après lequel notre projet est d'aller passer les suivants à Lyon….
Si m. de Voltaire n'eût point abandonné Ferney, nous n'aurions pas pensé à le quitter; l'idée que notre société aurait pu être agréable à madame Denis nous y aurait retenus; c'était notre projet, car en vérité nous ne pouvions pas deviner qu'à l'âge de m. de Voltaire, il consentit à abandonner sa belle retraite; et je suis intimement convaincu que ceux qui par séduction l'y ont déterminé n'ont consulté ni l'intérêt de sa santé, ni peut-être celui de sa véritable gloire (ceci entre nous). Je suis même si persuadé de cette vérité, que je ne désespère pas de le voir revenir avant l'hiver, et c'est ce que je désire le plus; en attendant je suis les préceptes qu'il nous a donnés dans Candide, et qu'il oublie, je cultive et pare mon jardin….