à Ferney 11e May 1778
Madame,
Nous avons apris avec la plus vive douleur que vous avez été fort malade pendant quelques heures.
La Lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire nous a un peu tranquilisez.
Mr Rieu avait fait partir le jour avant mon arrivée tous vos papiers par Borel. On est après à rassembler entièrement toutes vos affaires, et l'on aura soin de les arranger pour les expédier.
Mr De Crassy m'a dit qu'il avait chargé Mr Racle de vous paier à Paris. Je crois que Mr Rieu vous a dit que quelqu'un demandait à acheter vôtre Pianoforte.
St Jean et sa femme n'ont pas pu se décider d'aller à Paris. Je serai obligé de prendre un homme pour vous mener vôtre carosse.
J'ai été dans le dernier étonnement d'aprendre le départ de la femme à Bardy pour Paris. Je vous avoue que j'ai peine à revenir de ma surprise, et je suis bien persuadé que vous ne la serez pas moins. Je lui déclarai cependant que vous ne la vouliez absolument pas, et que son mari et elle s'ils ne pouvaient vivre qu'ensemble n'auraient qu'à s'arranger, que vous ne manqueriez point de cuisinier à Paris. J'ai marqué à Monsieur De Voltaire mon étonnement.
Je me dépêche tant que je puis pour terminer toutes les affaires de Mr De Voltaire et les vôtres, pour repartir d'abord.
Je vous demande toujours la continuation de vôtre amitié. Ma femme et ma fille sont à vos pieds.
Je suis avec un profond respect, et le plus sincère attachement
Madame
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Wagniere