30e 8bre 1777, à Ferney
Je vous crois actuellement, Monsieur, revenu de la campagne.
Si je pouvais sortir de mon lit je viendrais vous voir, et jouïr de vôtre conversation qui me consolerait des chagrins que me donne le malheureux procez que je suis obligé de poursuivre. Je perds absolument le procez que j'ai contre la nature, et je suis condamné à de terribles dépends.
J'ose espérer que vous m'empêcherez de perdre celui de Madame Denis contre Bourcet. Elle a été obligée de répondre à un mémoire entièrement faux par un autre mémoire où il n'y a que des vérités. Ces vérités aiant été découvertes à Genêve depuis peu, elle n'a pu les envoier à Monsieur Arnoult qui n'était pas à Dijon; elle les a adressées au procureur Maurier, qui je crois, peut et doit les signer, car Made Denis répond en son propre et privé nom, de ce qui est contenu dans cette réplique.
A l'égard de la forme et de la procédure, vous croiez bien que Made Denis n'y entend rien, elle ne sçait que dire vrai.
Nous vous suplions elle et moi, de vouloir bien présenter aux juges les éxemplaires que je mets sous vôtre protection. J'espère que cet écrit aiant mis sous leurs yeux d'une manière très claire tous les faits sur lesquels cette affaire est fondée, les moiens de droit seront traittées par Monsieur Arnoult, ou par vous qui êtes son ami, et qui daignez vous intéresser à Made Denis et à moi. Made Denis n'est pas en état de faire le voiage; nous sommes deux malades dont l'un a quatre vingt quatre ans, et nous plaidons contre un jeune homme qui se porte bien.
J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois, Monsieur, Vôtre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire
Je ne sçais pas si les mémoires qui doivent être présentés aux juges doivent être signés du procureur, et timbrés du timbre de Dijon.