ce samedi 12 août 1775
L'ami J. G. est entré dans l'assemblée du clergé et y a fait un beau discours contre la philosophie et il a dit: Qui le croirait, m. m. ?
le sanctuaire des lettres est devenu le repaire de l'incrédulité et de l'irréligion. Mais m., a dit un autre archevêque, vous n'y songez pas! Nous sommes 7 évêques dans l'Académie. J. G. a repris, Que serait ce si malgré les règles immuables de la prudence et les maximes de la plus saine politique, la protection accordée à l'impiété venait à entrer dans les vues du gouvernement? Chacun se disait à l'oreille, Cet homme là prend donc l'assemblée pour un concile d'oies? Mais nous ne sommes plus au temps de st Gregoire de Naziance. Alors J. G. a tiré de sa poche un projet de lettre au roi, car dans cette famille on aime à écrire au roi. D'abord le clergé devait y rappeler à sa majesté les sages lois de st Louis, de François 1, de Louis XIV &c. &c. contre les blasphémateurs et on ajoutait qu'il fallait établir des peines plus sévères contre les écrivains qui non contents de blasphémer donnaient des leçons de blasphêmes. M., a dit un des évèques, mais les lois de Louis XIV condamnent les blasphémateurs à avoir la langue coupée, vous demandez un supplice plus grave pour les philosophes et cela ne peut signifier qu'une peine de mort. Savez vous que nous ne pourrions pas signer une telle lettre sans devenir irréguliers et ce qui est pis ridicules et odieux? J. G. a remis son papier dans sa poche … et il disait à un de ses confidents, L'incrédulité a pénétré jusque dans l'assemblée. Je ne vois plus pour la religion d'appuis fidèles que m. l'archevêque
, mon frère et Fréron. Car Fréron a l'intendance des petits dogues qu'on élève contre la philosophie, il les dresse à aboyer et il les enivre, mais ce n'est pas de gloire.
Papillon philosophe voit bien mauvaise compagnie s'il voit des gens qui vous attribuent le Bon sens. C'est comme les écoliers à qui les colporteurs disent que les turpitudes qu'ils leur apportent sont de vous pour les vendre un écu de plus. Jamais les gens censés ou sensés n'ont entendu parler de ces imputations. On vous reproche au contraire d'avoir trop crié contre les athées. Je conviens qu'ils ont eu tort d'écrire des déclamations et de les écrire très longuement. Je conviens que s'il est dangereux que le déisme ne mène à la superstition, il était inutile de le dire à présent qu'il est question d'aller de la superstition vers le déisme. Je conviens que c'est une grande maladresse de vouloir faire dépendre la chute d'une superstition absurde et sanguinaire de la décision d'une question de métaphysique qui demeurera obscure encore longtemps et peut-être toujours. Mais les athées sont sous le couteau et le couteau qui les égorgerait se plongerait bientôt dans le sang des déistes, et si on permettait de rechercher les athées Christophe de Beaumont et Denis Pasquier appelleraient athées quiconque éléverait des doutes sur la dévotion du sacré coeur ou sur l'infaillibilité du parlement.
Ne disons donc pas de mal des athées.