14e avril 1775
Je ne sais, Monsieur, si vous avez été reçu, mais je suis bien sûr que si vous l'avez été c'est un des plus beaux jours de nôtre académie.
Vous ne sauriez croire combien je suis fier d'être vôtre confrère.
Oui, sans doute, j'avais déjà reçu vôtre première Lettre, dans laquelle vous daigniez me parler avec trop de modestie de la justice que le jeune auteur de Don Pèdre vous avait rendue. A l'égard du voiage de la raison et de la vérité, je crois qu'elles termineront leur course dans l'académie, le jour que vous y parlerez.
Made Denis a été très dangereusement malade dans nôtre hermitage, depuis plus d'un mois, j'ai craint beaucoup pour elle. Je ne tiens plus à la vie que par l'amitié.
Je ne sais, Monsieur, si vous avez vu une épitre d'un prétendu chevalier de Morton à Mr De Tressan. J'ai été très affligé que Mr De Tressan m'ait pris pour ce Morton. Si la raison a rencontré Mr de Tressan dans ses voiages, elle aurait bien dû lui conseiller de ne pas faire imprimer des choses si dangereuses. Il me semble que quand on met son nom à un ouvrage, on ne doit pas dire si cruement ce que vous avez fait entendre si finement. Nous avons des ennemis qui nous combattent avec des armes trop respectées. Je vous respecte assurément plus qu'eux, mais je les crains.
Dès que vôtre discours sera imprimé, je vous suplie, Monsieur, de vouloir bien m'en faire part. Je mettrai ma félicité particulière à côté de la félicité publique.