1773-12-22, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean François Marmontel.

On dit, mon cher successeur, que vous vous mariez.
Ce n’est point en cela que vous êtes mon successeur, il ne m’a jamais apartenu de vous donner des éxemples en amour. Si la nouvelle est vraie je vous en fais mon compliment; si elle est fausse je vous en félicite encor.

Je vous envoie une petite édition de la Tactique bonne ou mauvaise, qu’on dit faitte à Lyon. Il y a un petit mot pour nôtre ami Clément et pour nôtre ami Sabatier. Il est vrai que ces cuistres ne méritaient pas de se trouver en bonne compagnie; mais ils n’y sont que comme des chiens qu’on chasse d’une église.

Ce Clément ne cesse de vous attaquer dans les admirables Lettres qu’il m’adresse. Est-ce que vous ne replongerez pas un jour ce polisson dans le bourbier dont il s’efforce de se tirer?

Je ne sais si vous avez reçu deux petits billets que je vous avais écrits, et que j’avais adressé imprudemment dans la rue des marais.

Marié ou non, conservez un peu d’amitié pour un vieux malade qui ne cessera de vous aimer que quand il ne sera plus.